C 2569 Inspection des manufactures. - Lettre de Necker à l'intendant, relative à la mise en vigueur des lettres patentes du 5 mai 1779, par l'article 2 desquelles les fabricants ont été invités à adresser au ministre les mémoires nécessaires pour rédiger de nouveaux règlements. - Circulaires aux inspecteurs et aux jurés-gardes pour leur recommander d'exiger des communautés qu'elles présentent, sans retard, des projets de règlements rédigés dans l'esprit des lettres-patentes. - Réponses des fabricants ; de monsieur d'Urre d'Aubais : « Aubais est un lieu considérable, le terroir n'y est pas de la première qualité, l'agriculture y est négligée à cause de l'incertitude des récoltes ; c'est ce qui fait recourir à la fabrication des moletons. Il sort de ce lieu environ 3 500 pièces d'étoffes, année commune ; les laines qui y entrent sont un objet d'environ 200 000 livres ; quatorze ou quinze cents personnes se ressentent de ce commerce. » - Mémoire des marchands de Béziers sur les causes du dépérissement des fabriques de France et sur les moyens de les rétablir, rédigé par Louis Vincentis : « le fabricant, livré à sa cupidité, fabrique arbitrairement, chacun cherche à violer les règlements par les voies les plus illicite..... Toutes les manufactures sont dans une si grande confusion, que les fabricants et commissionnaires se dévorent entre eux ; chassés de l'étranger et réduits aujourd'hui à la consommation intérieure du royaume, on les voit voyager et fourmiller dans toutes les villes, jusques dans les plus petits villages, pour offrir, avec instance, des marchandises qu'on choisit sur les échantillons. Le marchand, pour satisfaire à l'erreur du public, cherche le bon marché. Le fabricant qui a voulu faire de bonne marchandise et la vendre en proportion, s'est ruiné, parce qu'il a été forcé de la donner à bon marché. Il est aisé de se figurer la perte immense que l'État a faite par l'inconduite des fabricants et commissionnaires ; cette inconduite a fait perdre l'usage de bien fabriquer pour faire, à moins de frais, des marchandises abominables ; elle a fait perdre la majeure partie des ouvriers qui, ne pouvant subsister par la modicité de leur salaire, ont passé et passent journellement dans l'étranger ; et il est encore plus malheureux qu'ils ayent arraché tant de bras à l'agriculture pour les faire perdre dans les fabriques...... De vingt millions de marchandises qu'on suppose que toutes les nations qui font le commerce du Levant peuvent tirer, chaque année, des états du grand seigneur, il y en a plus de quinze pour les Anglais et les Hollandais, et environ deux et demi pour les Français, et le restant pour les Vénitiens et les Génois. Qu'on compare à présent la différence du temps où les Français faisaient seuls ce commerce, à l'exclusion de tous les autres, et on verra que cette perte est inappréciable..... Ces malheurs, quoique grands, ne sont rien en comparaison de l'affreuse misère qu'éprouvent les ouvriers. Trente mille personnes, occupées au travail des manufactures de cette province, n'ont pas de pain pour subsister. On voit, dans des villages de nos montagnes, de nombreuses familles couchées par terre, déguenillées et manquant de tout ; des enfants maigres et exténués par la faim, végétant, sans aucune espèce de ressource, dans le pays le plus aride. » - Les fabricants de Carbonne sont désireux de maintenir la réputation qu'ils ont acquise par plus de 60 ans de travail. - Les jurés-gardes de la draperie de Carcassonne demandent à être débarrassés « d'une multiplicité de visites coûteuses et inutiles » ; Airole, fabricant de draps du Levant qu'il vend par traités aux maisons du Caire, fait l'éloge d'une industrie que sa famille exerce depuis quatre générations. - L'inspecteur de Carcassonne, Cazaban, signale Lavelanet comme manquant d'un bureau de visite. - A l'occasion du mauvais système de manipulation pour l'apprêt des draps dans son département, il rappelle que Vaucanson, passant par Carcassonne, dix-huit ans auparavant, avait indiqué le remède par un changement à introduire dans l'instrument en usage chez les maîtres presseurs : « je proposay ce changement aux principaux, mais aucun ne voulut le faire, crainte que les ouvriers de ce pays ne sussent point construire le tout d'une façon solide. » - Lettre du même sur la jurande de Cene. « La fabrication des étoffes est grossièrement faite, cependant elles avaient autrefois plus de consommation, surtout lorsque le Canada étoit à la France. » - Lettres des jurés-gardes de Clermont-de-Lodève, La Bruguière, La Caune, La Salle, La Voulte, Limoux, Monoblet, Montesquieu, Montpellier (les fabricants de bas). - Le subdélégué de Nîmes rappelle qu'il y a deux corporations distinctes ; la plus riche est celle des « marchands de soie et faisant fabriquer en étoffes de soie », la plus importante par le nombre de ses membres, celle des « maîtres fabricants en étoffes de soie et mélangée. » - L'inspecteur rapporte le bruit qui court, à savoir que « les projets de règlements dont s'occupe l'administration ne regardoient absolument pas les fabriques de Nîmes auxquelles on connaissoit trop les conséquences de mettre des entraves. » - Lettre de Le Blanc, inspecteur général, constatant que, pendant la période de liberté industrielle, c'est-à-dire depuis 1756, les fabriques de Nîmes ont établi 2 000 métiers, et n'en comptaient auparavant que 800. - Lettre des fabricants de bas de Nîmes, exposant : « que toute gêne et règlements seroient destructifs de la fabrique, que cette opinion est fondée sur une expérience de plus de cinquante années, que tant que la fabrique a vécu sous le régime des règlements, elle n'a fait que végéter, n'ayant occupé, pendant tout ce temps-là, que mille métiers, et que, depuis qu'elle a eu la liberté de travailler suivant le goût de ses consommateurs elle en a occupé jusques à 5 000 jusques à l'époque de l'édit prohibitif de la cour d'Espagne qui défend l'entrée des bas étrangers dans les Indes. Dans le temps des règlements, les articles (modèles) que l'on fabriquoit dans Nîmes, étoient bornés à sept ou huit, tandis qu'ils se sont multipliés jusques au-delà de quatre-vingt... L'édit prohibitif de la cour d'Espagne a enlevé près des deux tiers de la consommation. » - L'inspecteur de Saint-Chinian adresse plusieurs projets de certificats à délivrer aux fabricants, et qui contiennent diverses formules nouvelles pour le visa des inspecteurs et des jurés-gardes. - Lettre de l'intendant à l'inspecteur de Toulouse, relative à la fabrique de toiles peintes de Clerc, Querot et Cie, de Toulouse. - Rapport de l'inspecteur Huet au Ministre sur les démarches qu'il a faites, auprès des corporations de fabricants de son département, pour demander leur avis au sujet des nouveaux règlements ; il n'a pu obtenir aucune réponse, ces industriels étant très-bornés et ne connaissant que l'art servile de fabriquer et de vendre leurs étoffes sans aucune idée d'amélioration. - Circulaire du même aux jurés-gardes pour leur signifier de nouveaux ordres de l'intendant relatifs aux questions posées par le Conseil. - Lettre du même à l'intendant, contenant l'exposé de son opinion personnelle sur les progrès à réaliser dans les manufactures, l'établissement de commis dans les bureaux de visite et de contrôle, les abus à réprimer dans la direction des manufactures royales, etc. - État des communautés de l'inspection de Toulouse, consultées par Huet, inspecteur : marchands drapiers de Toulouse, fabricants de couvertures et de moletons de coton de la même ville, fabricants de couvertures de laine, fabricants de bas et bonneterie, les manufactures royales de de Puimorin, Léotard, de mesdames Ves Debru et de la Penne. - Lettres de Cazals au nom des fabricants de couvertures et de moletons de coton ; de la Ve Debru, comme opposante aux conclusions de la précédente lettre : « il est bien douloureux pour moi, qui ai vu prendre naissance, dans ma famille, à cette branche de commerce, de me voir réduite à recevoir la loi d'un petit nombre de fabricants, etc. » - Des jurés-gardes des fabriques de mignonettes : « nous vous supplions de nous être favorables pour nous obtenir le bon ordre et l'amélioration de nos fabriques qui, depuis longtemps, déclinent par la défectuosité des ouvrages... » - Des jurés-gardes des fabriques de bas. - De Burgalat, au nom du corps des apprêteurs, qui se plaint de manquer de machines et d'ustensiles perfectionnés ; il faudrait une avance : « notre corps ne peut la faire parce qu'il s'est beaucoup endetté pour soutenir la concurrence des foulons. Cette affaire nous coûte, en pure perte, plus de 25 000 livres, somme qui seroit plus que suffisante pour opérer la perfection du travail... » - Tableau d'échantillons d'étoffes fabriquées à Toulouse en 1780, par l'inspecteur Huet (les échantillons manquent) : burats, mignonettes doubles, savoyardes, burats communs, mignonettes simples, serges en soie. « Toutes ces qualités pêchent par la qualité des laines, qui sont très-vives et dures, au lieu d'être fines, douces et moelleuses, comme on les employait il y a sept ou huit ans ; les fabricants se trouvent obligés d'employer des laines relatives aux prix auquel on veut acheter lesdites étoffes. Les fabriques, au lieu de se perfectionner, s'affoiblissent. Il n'est pas 150 métiers à Toulouse aujourd'hui de toutes ces étoffes et, la plupart du temps, la moitié ne travaillent point. Il y avoit, en 1767, au moins 1200 métiers, maintenant les ouvriers manquent et ne veulent plus s'occuper de ce genre de fabrication, n'y pouvant gagner leur vie. En général, ces étoffes sont mauvaises et de peu de durée. Les indiennes qui se lavent sont plus galantes et de plus de durée... Les petites étoffes de soie se vendent à bon marché et toutes les artisanes les portent parce que le luxe est tellement répandu dans tout le Royaume, que tous les états se trouvent aujourd'hui confondus par la façon de s'habiller, l'artisan ne veut plus porter des étoffes de laine ; il n'est plus que les servantes et les gens de la campagne, peu à leur aise, qui consomment continuellement de ces étoffes. » - Lettre des fabricants de couvertures de laine de Toulouse, contenant leurs vues sur les règlements projetés ; - lettre de l'inspecteur Huet, recommandant Lafond, fabricant de couvertures, comme le principal industriel de Toulouse, dans cette partie qu'il a amenée à un haut état de perfection, sans avoir augmenté les prix ; - lettre du même demandant des instructions spéciales pour saisir les étoffes défectueuses dont le nombre augmente de jour en jour : « Depuis les lettres-patentes du 5 mai dernier, les fabricants se sont relâchés : je n'ai point encore vu d'aussi mauvaises et défectueuses marchandises que celles qui se fabriquent depuis un an. Les communautés se sont imaginées que les dispositions des anciens règlements devaient être éteintes. » - Lettres des subdélégués de Tournon et d'Uzès, relatives à leur correspondance avec les corporations de leurs départements. 1779-1780
Description physique : Liasse. - 82 pièces, papier (1 imprimée).