Marceau André Gitard, alias "Galland", "Godin", naît le 2 février 1906 à Bompas (Pyrénées-Orientales), fils de Pascal Gitard, instituteur, et d'Antoinette Camredon, institutrice. Elevé dans un milieu familial attaché à la laïcité et politiquement situé à gauche, Marceau Gitard effectue des études secondaires jusqu'au baccalauréat au lycée de Perpignan. Poursuivant ses études supérieures, il obtient la capacité en droit et se présente au concours de commissaire de police, qu'il réussit. Marceau Gitard choisit alors comme première affectation un poste en Algérie. Appelé sous les drapeaux, il effectue son service militaire de mai 1926 à mai 1927 dans la marine.
Fonctionnaire de police, Marceau Gitard est commissaire en Algérie de 1930 à 1940. Initié dès 1928 au Grand Orient de France, il est membre de la loge "Les Amis réunis" de Sidi-bel-Abbès, puis d'une loge d'Oran quand il y reçoit sa mutation. S'il n'adhère à aucun parti politique, il se situe idéologiquement dans la mouvance de la SFIO.
Le 11 décembre 1930, Marceau Gitard épouse à Oran Pierrette Marcelle Boucabeille, née aux Trembles (département d'Oran) le 29 août 1912, d'une famille originaire de l'Aude. Le couple donne naissance à deux fils : Roland (né en1931) et Alain (né en 1936).
Mobilisé au cours de l'hiver 1939-1940, Marceau Gitard est placé en affectation spéciale dans la police en avril 1940. De nouveau en poste au commissariat du 3e arrondissement d'Oran, Marceau Gitard transmet en juin 1940 aux Anglais les plans du port de Mers-el-Kébir. La "Notice de renseignements", concernant Marceau Gitard établie à Montpellier par la préfecture de l'Hérault après la Libération, mentionne son engagement précoce dans la résistance "gaulliste" ; Marceau Gitard fonde une "officine de renseignements gaulliste" à Oran dès juillet 1940 et, selon une "Notice de renseignements" rédigée par ses soins après la Libération, il participe à l'organisation du mouvement "Combat" à Oran.
Le 12 septembre 1940, Marceau Gitard est relevé de ses fonctions, en application du décret du 17 juillet 1940, puis mis à la retraite d'office le 15 décembre 1940 par arrêté du gouverneur général d'Algérie. Alors qu'il est désormais surveillé, il est averti par ses collègues d'une arrestation imminente. Avec sa famille, il prend le bateau pour rejoindre Port-Vendres (Pyrénées-Orientales) et se réfugie chez sa mère, Antoinette Gitard. Il s'installe ensuite à Amélie-les-Bains (Pyrénées-Orientales), où il vend des douelles de tonneaux grâce à un cousin éloigné qui lui a procuré ce travail.
En décembre 1940, contacté par Pierre-Henri Teitgen, professeur de droit à Montpellier, Marceau Gitard accepte de fonder le mouvement "Liberté" à Perpignan. En décembre 1941, il est chargé par Henri Frenay de constituer le mouvement "Combat" dans les Pyrénées-Orientales. Chef départemental de "Combat" jusqu'en janvier 1943, sous le pseudonyme de "Galland", il rassemble, aidé par Mathieu Py qui devient l'un de ses proches, les éléments de "Liberté" et ceux, épars, du "Mouvement de libération nationale" d'Henri Frenay. Il désigne les responsables d'arrondissement de "Combat" (deux militants socialistes), Jean Font à Prades (février 1942) et Pierre Mau à Céret, ainsi que le commandant Ricart, à Perpignan. Durant toute l'année 1942, Marceau Gitard travaille au développement de "Combat" dans le département où il multiplie les contacts. Il met en place les structures du NAP (Noyautage des administrations publiques), organise l'AS (Armée secrète) et développe les contacts avec les autres mouvements de résistance du département ("Libération", "Franc-Tireur" et le "Front national"). Cependant les rapports de Marceau Gitard avec Camille Fourquet, issu de "Libération" et nommé chef départemental des mouvements unis de la Résistance (MUR) des Pyrénées-Orientales, sont vite empreints d'une méfiance mutuelle et révèlent les vives tensions internes au sein des MUR.
En janvier 1943, Marceau Gitard quitte les Pyrénées-Orientales après avoir désigné le commandant Fernand Viaud, chef du 427e GTE (groupe de travailleurs étrangers), comme son successeur à la tête de "Combat". Un moment caché dans l'Aubrac (départements de la Lozère et de l'Aveyron), puis à Naucelle (Aveyron), il finit par gagner clandestinement Montpellier. En mai 1943, Marceau Gitard, qui a quitté les Pyrénées-Orientales depuis quelques mois, revient à Perpignan, accompagné de "Pagès" et Missa, pour s'entretenir avec Camille Fourquet. Les rapports de "Vinet" (le commandant Viaud, chef départemental de "Combat") et de Charrier (alias "Vivien" et "Pagès"), chef des MUR de la R 3, confirment en effet ces tensions entre "Combat" et "Libération" dans les Pyrénées-Orientales, les cadres locaux de "Libération" reprochant notamment aux responsables de "Combat" de ne pas leur accorder la place qu'ils souhaitaient occuper dans la nouvelle organisation des MUR (organisation ayant été supervisée par Marceau Gitard en juin 1943).
À Montpellier, Marceau Gitard, sous le pseudonyme de "Godin", devient en avril 1943 le chef adjoint du NAP pour la région R 3, collaborant ainsi directement avec Gilbert de Chambrun et assumant de façon effective la direction du service clandestin. Sur ordre, il adhère à la Légion des Combattants, puis au SOL (Service d'ordre légionnaire) et à la Milice. Cette infiltration réussit pleinement car il parvient à renseigner "Combat", puis les MUR, sur les projets ourdis contre eux. Mais, le 12 octobre 1943, l'Abwehr (service de renseignement militaire allemand) réussit à se procurer une copie du plan d'insurrection clandestin en R 3 que Marceau Gitard avait élaboré car, comme tous les responsables régionaux des MUR, il pensait qu'un débarquement aurait lieu sur les côtes du Languedoc et du Roussillon. Comme responsable régional du NAP, Marceau Gitard intègre également le directoire des MUR en R 3.
Le 19 août 1944, peu avant la Libération de l'Hérault, Marceau Gitard se rend à Béziers avec Jacques Bounin, désigné pour exercer les fonctions de commissaire de la République en R 3, afin d'installer les nouvelles autorités. Il participe ensuite à la Libération de Montpellier (21 août 1944) et, à la préfecture, est chargé de la passation des pouvoirs. Il est également chargé par Jacques Bounin de l'arrestation le 22 août 1944 et de l'organisation de la détention du préfet de l'Hérault, du préfet de région et de l'intendant régional de police vichyste.
À la Libération, le 22 août 1944, Marceau Gitard est nommé Secrétaire général à la police pour l'ensemble de la R 3 (Languedoc et Roussillon). La nomination, avec le grade de préfet de 3e classe, est effective le 7 septembre. Il exerce ainsi des fonctions qui font de lui le successeur de l'intendant de police de Vichy. Il participe, avec d'autres chefs de la Résistance régionale et les nouveaux préfet et commissaire de la République, à la mise en place, le 27 août 1944, de la cour martiale de Montpellier, dont il est chargé du fonctionnement. Il accélère la procédure qui permet la comparution et la condamnation à mort du préfet Jean Rebouleau, d'Henri Cordier, un tortionnaire de la Milice, et de la condamnation à vingt ans de travaux forcés de l'intendant régional de police Charles Hornus. En décembre 1944, le commissaire de la République Jacques Bounin lui confie la délicate mission d'enquêter sur des exécutions sommaires à Béziers en décembre 1944 (enquête pour laquelle il obtient les félicitations du ministre de l'Intérieur en février 1945).
Mais durant l'automne 1944, Marceau Gitard est considéré comme un proche de Gilbert de Chambrun et comme un sympathisant du Parti communiste (PCF). Gilbert de Chambrun quitte Montpellier en janvier 1945 pour le front d'Alsace à la tête des FFI languedociens intégrés par amalgame dans l'armée régulière. Marceau Gitard perd alors son précieux appui, dans une période désormais marquée par la reconstruction de l'État sous la direction du Gouvernement provisoire de la République française et de son président, Charles de Gaulle.
Jacques Bounin, dans ses mémoires (Beaucoup d'imprudences, page 200), écrit que "La population [languedocienne] est émue. [...] Une enquête est prescrite, mais ce n'est qu'après le 7 janvier que je peux en tirer des certitudes. [...] Je demande la mutation immédiate du secrétaire général de la Police Gitard, car une trop longue intimité avec le maquis régional pendant la période de clandestinité lui rend difficile d'assumer ses fonctions avec objectivité et indépendance, malgré sa grande valeur".
Marceau Gitard conserve son poste de secrétaire général à la police jusqu'en février 1945. Le 26 février, le ministre de l'Intérieur annonce que Marceau Gitard est mis en congé pour un mois à compter du 1er mars 1945 et qu'il recevra une nouvelle affectation par la suite. Il est remplacé par Albert Koenig, résistant, commissaire de police à Montpellier avant son départ à Londres en avril 1943.
En juillet 1945, Marceau Gitard est mis à la disposition du ministère de la Guerre afin d'intégrer l'administration militaire en Allemagne. Un décret du 22 décembre de la même année précise qu'il est mis fin à sa délégation dans les fonctions de secrétaire général pour la police à cette date-là. En poste durant un an à Friburg-en-Brisgau (Bade-Wurtemberg), Marceau Gitard réintègre par la suite la police nationale, son administration d'origine, dans son grade de 1940. Cette réintégration équivaut à une rétrogradation au regard des hautes fonctions qu'il occupa entre août 1944 et février 1945. Nommé en Algérie, Marceau Gitard achève sa carrière comme commissaire divisionnaire. Pendant la guerre d'Algérie, ses fonctions l'amènent à participer activement à la lutte contre le FLN. En 1960, à la retraite, Marceau Gitard s'installe avec son épouse d'abord à Grolegeac (Dordogne), puis à Carcès (Var), où il décède le 5 juillet 1974.
Source : notice sur Marceau Gitard, rédigée par André Balent, dans Le Maitron (voir bibliographie).